A gauche, Le retable de Mérode, par le Maître de Flémalle (Robert Campin), peint vers 1420-1430. Metropolitan Museum of art à New York.

En dessous, détail du panneau de droite qui représente Joseph en train de fabriquer une souricière. Deux sont déjà prêtes ; l'une sur l'établi, l'autre sur le rebord la fenêtre.

L'objet est inattendu, surtout en présence d'une annonciation. Néanmoins, ce n'est pas une invention fantaisiste.

Ce détail a une signification théologique. La croix du Christ fut la souricière du diable ; l'appât avec lequel il fut pris fut la mort du Seigneur. Saint Augustin y vit une figure particulièrement heureuse de la Rédemption.

Le rôle de Joseph pour tromper le diable était tout à fait familier à l'époque du retable de Mérode.

Et la souris ? Si les textes théologiques fournissent un sens évident pour la souricière du panneau de Mérode, il existe des documents tout aussi explicites qui renvoient à la signification sexuelle. Dans la magie populaire et dans le folklore, la souris est une créature dans laquelle se concentre très fortement un sens érotique et diabolique.. Elle est le sein maternel, la femelle impudique, la prostituée, le diable. Cette conception de la souris mauvaise et érotique est partagée par les gens simples et cultivés.

Il n'est ainsi guère arbitraire de voir dans la souricière de Joseph un instrument doué d'un sens sexuel latent dans ce contexte de chasteté et de fécondation mystérieuse.

Tout ceci est extrait du chapitre intitulé Le symbolisme du retable de Mérode de l'ouvrage de Meyer Shapiro :

Style, artiste et société, Éditions Gallimard, 1982, p 146 à170